La Grande Fresque de La Villa des Mystères

vue par Gilles Sauron

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 [...] Héritière d'une longue tradition où le pouvoir s'identifiait avec le culte du secret et de la dissimulation, l'aristocratie romaine avait accueilli avec faveur cette idée grecque que certaines vérités ne peuvent s'exprimer que dans le langage obscur de l'oracle ou celui allégorique du mythe (on songe au Songe de Scipion de Cicéron), et on riait à Rome de l'Ajax d'Ovide, incapable de comprendre le décor du bouclier d'Achille qu'il voulait pourtant s'approprier (Métamorphoses, XIII, 291 -- 295), ou du Trimalcion de Pétrone, qui se croyait obligé d'accompagner d'inscrip-tions la mégalographie autobiographique

 

que, à l'imitation des nobles romains qu'il ne faisait que singer, il avait fait peindre sur une paroi de son atrium (Satiricon, XXIX, 4). Devenus aux environs de notre ère de redoutables manipulateurs de formes (grecques pour l'essentiel), les nobles romains faisaient un double et contradictoire usage des symboles et des allégories : d'un côté, ils les utilisaient à des fins pédagogiques, pour marteler les thèmes de leur propagande, et Auguste était passé maître dans cette technique au point de remplacer l'usage de la parole articulée dans les spectacles théâtraux par l'art du pantomime qui transforme l'acteur muet en