La Grande Fresque de La Villa des Mystères

vue par Paul Veyne

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Notre fresque pourrait s'intituler Matin de noces au gynécée ; son original grec était ce qu'on appelait un pastos : une peinture (ou, d'autres fois, une tapisserie) qu'un riche personnage faisait peindre ou suspendre chez lui pour le jour de ses noces, afin d'en rehausser l'arrivée de la fiancée ; celle-ci, abandonnant le gynécée maternel, était amenée en cortège cérémoniel dans la demeure de son mari, où l'attendait un nouveau gynécée, dont elle serait la souveraine. Le pastos, on le devine, était peint ou brodé de scènes appropriées à cette heureuse circonstance.

Comme quelques autres fresques pompé-iennes et de nombreuses peintures de vases grecs, notre pastos fait voir l'intérieur d'un gynécée grec, cette sorte de harem mono-

 

game, peuplé de femmes et d'enfants.

   Comme des douzaines d'autres vases, il montre ce qui se passe au gynécée, le matin des noces. Pour nous borner au principal, le jeune garçon lit ses Classiques, sous les yeux de sa mère, cependant que celle-ci observe sa fille qui se pare richement pour ce grand jour, comme sur mainte autre peinture ; plus loin, la mère, au moyen de récipients et d'aiguières, parfume l'eau du bain postnuptial, comme une autre mère le fait sur une autre peinture nuptiale célèbre, qu'on appelle Les Noces aldobrandines. Bain dont les archéologues semblent ignorer l'existence, peut-être par pudeur, et qui était le symbole inattendu de l'union sexuelle, en Grèce comme à Rome.